Le monde de l'entraînement en endurance est rempli de termes techniques qui peuvent parfois prêter à confusion. Parmi eux, le **Tempo Run** se distingue comme une séance incontournable pour tout coureur, du 10 km à l'ultra-trail. Ce n'est ni un simple footing, ni une séance de fractionné intensive, mais une zone d'effort "confortablement difficile" qui agit directement sur le cœur de votre performance : le seuil anaérobie.
Pour faire simple, le Tempo Run est la séance qui vous permet de courir plus vite, plus longtemps, sans subir les effets de la fatigue musculaire. Il est le maillon essentiel qui transforme un moteur d'endurance en une véritable machine de course. Dans ce guide complet, nous allons explorer en détail la science derrière cette méthode, vous donner les clés pour la pratiquer et la placer judicieusement dans votre plan d'entraînement. Prêt à repousser vos limites ? C'est parti !
Pour comprendre l'intérêt du Tempo Run, il faut d'abord s'attarder sur une notion physiologique capitale : le **seuil anaérobie lactique** (ou **seuil 2**). Le corps humain est une usine énergétique remarquable, capable de produire de l'énergie de manière aérobie (avec oxygène) à faible intensité, et de manière anaérobie (sans oxygène) à haute intensité. Le seuil anaérobie est le point d'inflexion où l'acidité musculaire (produite par les lactates) commence à s'accumuler plus rapidement que le corps n'est capable de l'éliminer. Une fois ce seuil dépassé, le coureur est condamné à ralentir, voire à s'arrêter, en raison de la sensation de brûlure et de fatigue musculaire intense.
Le Tempo Run est conçu pour faire de vous un coureur plus efficace en déplaçant ce fameux seuil. L'objectif est de s'entraîner à une intensité légèrement inférieure à ce seuil, mais suffisamment élevée pour que votre corps s'adapte. En flirtant avec cette limite, vous améliorez la capacité de votre organisme à utiliser l'oxygène et à recycler l'acide lactique. C'est l'une des adaptations physiologiques les plus recherchées, car elle permet de maintenir une vitesse élevée sur de longues distances sans que la fatigue ne s'installe prématurément.
Dans l'univers de la physiologie du sport, on distingue deux seuils principaux :
Une étude clé de l'université de Cologne (2014) a démontré que l'entraînement spécifique au seuil, comme le Tempo Run, permet d'augmenter le **Maximal Lactate Steady State (MLSS)**, ce qui se traduit par une amélioration directe de la vitesse de course et de l'endurance sur des distances de 10 km au marathon.
Le Tempo Run n'est pas un sprint, et ce n'est pas non plus un footing lent. C'est une allure de travail spécifique qui correspond à une zone d'intensité très précise. Pour la maîtriser, il faut savoir écouter son corps et utiliser les bons outils.
Le Dr Jack Daniels, entraîneur et auteur de renom, a popularisé les zones d'intensité en running, plaçant le Tempo Run dans une zone qu'il appelle l'intensité "seuil" (Threshold), qu'il définit comme une allure que l'on peut maintenir pendant environ 60 minutes.
Le Tempo Run peut se pratiquer de différentes manières, en continu ou sous forme de fractions. Le choix dépend de votre niveau, de votre objectif et de la phase de votre plan d'entraînement.
C'est la forme la plus classique. Après un bon échauffement (15-20 minutes), vous enchaînez une période de 20 à 40 minutes à votre allure Tempo Run, avant de terminer par un retour au calme de 10 minutes. C'est une séance exigeante qui demande une bonne maîtrise de son allure, car si vous partez trop vite, vous risquez de dépasser votre seuil et de ne pas pouvoir tenir la durée prévue. Le conseil : commencez la séance légèrement en dessous de l'allure cible et accélérez progressivement.
Exemple de séance :
Pour les débutants ou ceux qui veulent accumuler plus de temps au seuil, il est judicieux de découper la séance en fractions avec de courtes récupérations. Cela permet de s'habituer à l'effort sans accumuler la fatigue. L'intervalle de récupération est volontairement court (2-3 minutes) pour ne pas laisser la fréquence cardiaque redescendre trop bas.
Exemple de séance :
Cette séance permet de passer 30 minutes au seuil, ce qui serait probablement trop difficile à tenir en continu pour la plupart des coureurs. C'est une excellente alternative pour débuter et progresser.
Pour mieux situer le Tempo Run, voici un tableau récapitulatif des principales zones d'entraînement :
Type de séance | Intensité (FC) | Sensation | Objectif principal | Exemple de course |
---|---|---|---|---|
Endurance Fondamentale | 65-75% de la FCM | Très facile, on peut parler | Développement aérobie, récupération | Footing du matin, sortie longue |
Tempo Run | 85-92% de la FCM | "Confortablement difficile", on peut parler par mots | Repousser le seuil anaérobie, endurance de force | Course de 15 km, semi-marathon |
Fractionné (VMA) | 95-100% de la FCM | Très difficile, essoufflement total | Amélioration de la puissance, de la VO2 max | Course de 5 km, entraînements courts |
Le Tempo Run est une séance de qualité, et comme toute séance de ce type, il ne faut pas en abuser. Une à deux séances de Tempo Run par semaine suffisent amplement, et il est essentiel de les intégrer dans un plan d'entraînement cohérent. La règle du 80/20 s'applique ici aussi : la majorité de votre volume (80%) doit rester en endurance fondamentale pour permettre la récupération et la construction de votre base aérobie. Le Tempo Run est l'un des 20 % restants.
Il est particulièrement utile pendant la **préparation spécifique d'une course**. C'est une séance qui vous prépare à l'allure de compétition et renforce votre capacité à maintenir un effort soutenu. Sur un marathon ou un ultra-trail, le Tempo Run vous apprend à gérer votre allure pour ne pas "exploser" en milieu de course, une compétence vitale pour la réussite.
👉 Pour aller plus loin et comprendre les mécanismes de la fatigue, n'hésitez pas à lire notre guide complet sur les effets de l'acide lactique en course à pied.
En conclusion, le Tempo Run est le couteau suisse de l'entraînement. Il agit à la fois sur votre vitesse et sur votre endurance, en vous apprenant à gérer l'effort de manière plus efficace. Loin d'être une contrainte, c'est une séance qui vous donne les clés pour débloquer votre plein potentiel. C'est un travail de l'ombre, sans la gloire du sprint ou la satisfaction de la longue distance, mais qui vous fera progresser comme jamais. Alors, la prochaine fois que vous partez courir, n'ayez pas peur de vous aventurer dans cette zone "gris", car c'est là que la magie opère. Bonne course !
Un footing est une course à faible intensité (endurance fondamentale), où l'objectif est la récupération et le développement de la base aérobie. Un Tempo Run est une séance de qualité à intensité plus élevée (au seuil anaérobie), visant à repousser votre capacité à maintenir une vitesse soutenue sur la durée.
Oui, mais avec prudence. Les débutants devraient d'abord construire une base solide en endurance fondamentale avant d'introduire une séance de Tempo Run, qui peut être plus exigeante pour le corps. Il est conseillé de commencer par des séances de Tempo Run fractionné, plus faciles à gérer.
Idéalement, placez votre séance de Tempo Run au milieu de la semaine, à au moins deux jours de votre sortie longue ou de votre séance de fractionné la plus intense, afin de laisser le temps à votre corps de récupérer et d'assimiler l'effort.
Le meilleur moyen est de se fier à votre cardiofréquencemètre pour rester dans la zone de 85-92% de la FCM. Si vous n'en avez pas, fiez-vous à votre ressenti : l'effort doit être "confortablement difficile" et vous ne devez pas pouvoir dire plus que quelques mots à la fois.
Oui, c'est même une excellente idée pour les traileurs. L'objectif étant de rester dans la bonne zone de fréquence cardiaque ou de ressenti, il est tout à fait possible de faire un Tempo Run en montée ou sur sentier. L'allure sera plus lente, mais l'intensité restera la même.
La durée idéale varie selon le coureur. Pour les débutants, une séance de 20 minutes en continu ou 2 à 3 fractions de 10 minutes est parfaite. Les coureurs plus expérimentés peuvent aller jusqu'à 40 à 60 minutes de travail au seuil.
Le Tempo Run, en tant qu'entraînement à haute intensité, brûle plus de calories par minute que l'endurance fondamentale. Il est donc un excellent complément pour la perte de poids, mais n'oubliez pas que l'endurance fondamentale reste essentielle pour éduquer le corps à utiliser les graisses comme carburant sur le long terme.